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Aristide Nepo

FACE A MACRON LE PETIT, LE PEUPLE EN GRAND

Alors que le nouveau gouvernement a été nommé ce samedi 21 septembre 2024, retour sur le rassemblement pour la démocratie et le respect des résultats des élections à Thionville le samedi 7 septembre 2024.

 

Solidarité transfrontalière

Il est presque 16.00 à l’horloge de la gare de Bettembourg. Je rejoins Jules et Colette . Jules est français, il réside depuis si longtemps au Luxembourg qu’il a parfois tendance à être plus luxembourgeois que les Luxembourgeois. Colette, elle, est une militante de cette gauche luxembourgeoise qui ne désespère pas, depuis des années, de rendre ce grand-duché plus égalitaire, plus durable, et moins libéral.



Lorsque Macron, le 9 juin 2024, a dissout l’Assemblée nationale, ils se sont très vite mobilisés et ont répondu avec d’autres à l’appel du Nouveau Front populaire. L’une parce qu’elle était de gauche et qu’elle se sentait solidaire avec ses voisins confrontés au risque de voir l’extrême droite du clan Le Pen arriver au pouvoir. L’autre, parce qu’en plus, il était français et qu’il devait, en ce court laps temps, convaincre ses compatriotes résidents au Luxembourg de voter pour la candidate du Nouveau Front populaire.


Le 7 juillet, les efforts ont payé, le Nouveau Front populaire est en tête. Bien sûr, pas autant que ces deux militants l’auraient souhaité. Déçus aussi de voir la candidate du Nouveau Front populaire battue pour quelques dizaines de voix dans la circonscription des Français du Benelux (Belgique, Pays-Bas, Luxembourg). Déçus aussi des résultats dans la Moselle et la Meurthe et Moselle voisines où le Rassemblement national progresse, malgré la qualité des candidat.es et le travail à l’Assemblée des sortant.es.


On connaît la suite. Deux mois de procrastination présidentielle, trouvant prétexte des Jeux Olympiques pour remettre à plus tard ce qu’il aurait dû faire le jour même. Puis, se prenant pour le Premier ministre, et pour garder toute la lumière sur soi, lancer des consultations après avoir refusé de nommer Première Ministre Lucie Castets, candidate proposée par le Nouveau Front populaire, bloc arrivé en tête.


Pour finalement promouvoir Michel Barnier, de droite, qui proposait, en tant que candidat à l’élection présidentielle en 2021 (dans le cadre de la primaire du parti Les Républicains), un moratoire sur l’immigration, la limitation drastique du regroupement familial, la fin des régularisations et de l’aide médicale d’État, les expulsions facilitées, un référendum sur l’immigration et la réforme du droit d’asile.


« Lorsque le vote est à ce point bafoué, il n’y a plus que la rue pour se mobiliser et tenter de rétablir la démocratie. Les Français ont répondu à l’appel et ont fait front républicain contre le Rassemblement national. Ce n’est pas pour se retrouver avec un ersatz de Le Pen à Matignon. »


C’est le sens de l’appel à manifester en France, d’abord à l’initiative des organisations et syndicats lycéens ou étudiants, relayés par des partis politiques du Nouveau Front populaire, France insoumise en tête. Et c’est par sens de la solidarité que ces militants, accompagnés de quelques autres, se déplacent pour soutenir leurs camarades en France.


Manifestation traditionnelle à Metz et rassemblement populaire à Thionville


Dans la zone frontalière, c’est à Metz le matin ou à Thionville l’après-midi que se passaient les rassemblements.


« Je serai bien allée à Metz, mais le samedi matin, j’avais déjà une activité de prévue » dit Colette. « Et Thionville, c’est moins loin » ajoute Jules.


Après une vingtaine de minutes de marche, c’est dans la Cour de Rome que ces deux militants rejoignent les autres Luxembourgeois et la population thionvilloise et des alentours venue se rassembler sur une des places de ce quartier au Nord de la ville.


« On ne manifeste pas ? » demande presque déçue Colette.


Non, pas de manif mais un rassemblement populaire au cœur du quartier. Au contact des gens. Qui descendent parce qu'ils sont curieux.. Ils ne sont pas dans un rôle de militant ou de responsable politique. En tout cas pas au début, lorsqu’ils s’approchent, attirés par le bruit et l’odeur, de la sono et des crêpes, et se rendent disponibles non pas pour revendiquer, mais pour discuter, débattre, témoigner, échanger et simplement, passer du temps ensemble. L’occasion de se rencontrer, entre voisins, de descendre pour voir ce qu’il se passe.


 

« C’est vrai qu’il ne se passe pas souvent grand-chose ici » dit un des habitants venus jeter un œil. Une autre pointe le bout de son nez après être descendu relever son courrier, comme elle le fait chaque samedi.


« Une seule fois par semaine. Parce qu’on est assailli de factures, alors ça met moins de coup au moral. »


Et lorsqu’elle demande pourquoi on est là, il est facile de lui répondre : pour contester le coup de force de Macron, la nomination d’un premier ministre de droite, avec l’aval de l’extrême droite et rappeler que les Français qui ont voté il y a deux mois n’ont pas décidé cela.


« Vous avez raison. Il faut faire quelque chose pour les retraites. Normalement, pour moi, ça aurait dû être dans 3 ans, mais ce sera dans 5 ans. Et avec ma petite retraite, avec le loyer, la voiture, les charges, il ne va pas me rester grand-chose pour vivre. J’en suis à penser à partir. Quitter la France. Je suis né ici, j’ai grandi ici, j’ai toujours habité ici, travaillé ici. Mais ça ne sera pas possible, je ne gagnerai pas assez pour vivre, juste assez pour survivre. »


Derrière le stand où Brice et Gaëlle s’affairent à préparer les crêpes avec les moyens de camping, la file de gamins et gamines du quartier grandit.


Jules s’en va discuter avec d’autres personnes comme ce militant communiste du rez-de-chaussée qui parle avec son voisin qui lui fait remarquer qu’« on n’est pas très nombreux, c’est pas cela qui fera changer les choses. »


« On n’est peut-être pas très nombreux, mais on est là. Rappelez vous les Gilets Jaunes, au début, ils étaient 3-4 sur un rond-point, loin de s’imaginer que le mouvement allait prendre une telle ampleur. »


« Et pis on est ensemble. On passe un bon moment, à parler de politique, à rigoler, y a à boire et à manger. Et ça, Macron ne nous le volera pas. »


D’autres racontent leurs déboires avec la justice à la suite des violences policières en manifestation. D’autres se moquent de cet agent des renseignements généraux présent dans la petite voiture noire de marque française, très vite repéré et à qui on offre à boire et à manger. Un « atelier » permet l’expression libre des plus grands comme des plus petits, où certains expriment leur désamour « de le Maire » sans qu’on sache vraiment s’il s’agit du ministre de l’Economie ou du premier magistrat de la ville.


 

Les discours ponctuent cette fin d’après-midi.


« Il faut rester mobiliser, notamment en vue de la prochaine action le 1er octobre, en espérant que les syndicats, qui s’étaient fortement mobilisés au moment de l’élection, reprendront le flambeau pour la mise en place du programme du Nouveau Front populaire. »


« II faudra organiser plus d’actions et de manifestations à Thionville, aller à Metz, c’est une vraie galère. »


Une derrière saucisse, un salut envers les camarades encore présents, une dernière blague. Colette est déjà partie. Pour Jules, il va être temps de rentrer.


« Le cœur chaud des rencontres d’un bel après-midi. Plus que jamais déterminé à poursuivre le combat. »



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